Un nouveau rapport israélien faisant état de « viols systématiques et prémédités » par le Hamas s’appuie sur les informations débunkées des médias occidentaux

Un nouveau rapport israélien
faisant état de
« viols systématiques et prémédités »
par le Hamas
s’appuie sur
les informations débunkées
des médias occidentaux

Par Max Blumenthal

Une publication The Grayzone


Propagande Médias Terrorisme Corruption Droits de l’homme
Palestine Israël États-Unis Occident
Article

Traduit de l’anglais par EDB () • Langue originale : anglais


Le contenu du document de l’Association des centres d’aide aux victimes de viols en Israël, qui prétend que les viols du Hamas sont « systématiques », provient en grande partie de témoignages de seconde main discrédités et d’articles de presse débunkés. Parmi les sources les plus citées, figure un article douteux du New York Times qui a déclenché une révolte au sein même du journal, de la part de son personnel.

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Les médias occidentaux font grand cas d’un nouveau rapport de l’Association des centres d’aide aux victimes de viols en Israël (Association of Rape Crisis Centers in Israel / ARCCI), affiliée au gouvernement israélien, qui affirme que les combattants du Hamas ont mené une campagne de viols « systématiques et prémédités » le 7 octobre.

« Un rapport israélien trouve des preuves de viols et d’abus “systématiques” lors de l’attaque du 7 octobre », a titré le Guardian. « Un rapport fait état de viols et de meurtres systématiques de femmes en Israël le 7 octobre », s’est écriée l’agence allemande DPA. Pendant ce temps, le Jerusalem Post hurlait que « Les terroristes du Hamas ont forcé des familles à regarder leurs proches se faire violer sous la menace d’une arme ».

Bien que l’Associated Press ait reconnu que le rapport « ne précisait pas le nombre de cas documentés et n’identifiait pas les victimes, même de façon anonyme » et que ses auteurs « refusaient de dire s’ils avaient parlé aux victimes », des dizaines d’organes de presse grand public ont présenté les conclusions de l’ARCCI comme des faits incontestables.

Pourtant, un examen approfondi de ce rapport révèle qu’il y manque de nouvelles recherches, qu’il ne contient aucune preuve tangible et qu’il s’appuie plutôt sur des extraits d’articles contestés et rédigés par les mêmes médias occidentaux qui ont encouragé sa diffusion. Parmi les sources les plus fréquemment citées par le document, figure le tristement célèbre et mauvais article du New York Times, rédigé par Jeffrey Gettleman, qui prétend détailler « comment le Hamas a utilisé la violence sexuelle comme une arme, le 7 octobre ».

À la suite d’un tollé interne provoqué par une série de révélations de The Grayzone qui ont mis en évidence des incohérences majeures et des mensonges manifestes de la part des sources du journal, le Times a annulé un épisode de son podcast « The Daily » (« Le Quotidien ») consacré à son reportage.

Malgré la controverse entourant l’article, l’ARCCI le cite douze fois dans son propre document, tout en s’approvisionnant de témoignages de seconde main auprès d’un grand nombre des mêmes Israéliens discrédités que ceux sur lesquels s’est appuyé Gettleman.

L’ARCCI se base également sur le témoignage de ZAKA, le groupe de « sauvetage » ultra-orthodoxe qui a lancé les fausses allégations selon lesquelles le Hamas avait décapité des bébés, découpé des fœtus du ventre de femmes enceintes et déjeuné dans la maison d’une famille israélienne après en avoir tué et mutilé les membres. ZAKA a été critiqué dans les médias israéliens pour avoir malmené les preuves des attaques du 7 octobre, et même pour avoir mis en scène des atrocités à des fins de collecte de fonds.

Au moins un quart des citations du document de l’ARCCI sont tirées de l’article du New York Times, largement critiqué, et de bénévoles de ZAKA dont la crédibilité est mise à mal. Le reste s’appuie sur des témoins autoproclamés et douteux, comme la réserviste de l’armée israélienne Shari Mendes qui a faussement affirmé que le Hamas avait non seulement découpé un fœtus du ventre d’une femme israélienne enceinte, mais qu’il avait aussi décapité sa mère.

Des sources discréditées et des articles débunkés constituent l’ossature du nouveau rapport sur les « viols du Hamas »

En citant le New York Times pour démontrer le viol systématique par le Hamas le 7 octobre, l’ARCCI fait référence à « une vidéo partagée sur les réseaux sociaux » qui montre « une femme dans une robe déchirée, sans sous-vêtement, blessée et avec le visage brûlé. Les enquêteurs de la police ont conclu qu’elle avait été violée ».

Cette section fait référence à Gal Abdush, une jeune femme tuée le 7 octobre et qui figure comme un personnage central dans l’article du Times. Comme l’a rapporté The Grayzone, la sœur et le beau-frère d’Abdush ont tous deux publiquement nié qu’elle ait été violée, la première accusant le journal d’avoir manipulé sa famille pour qu’elle participe à l’enquête en l’induisant en erreur sur l’angle éditorial.

L’ARCCI cite ensuite un récit du Times concernant « un secouriste de l’IDF1 » qui a affirmé être entré dans une pièce, dans le kibboutz de Be’eri, « où les corps de deux filles ont été retrouvés, l’une d’entre elles ayant le pantalon baissé et des restes de sperme sur le dos ».

The Grayzone a également dévoilé cette source, en révélant qu’il s’agit d’un réserviste de l’unité de sauvetage tactique spéciale « 669 » de l’armée de l’air israélienne, qui s’identifie aux médias uniquement en tant que « G », mais dont le vrai nom est Guy Melamed. Comme nous l’avons expliqué, aucune fille n’a été trouvée au kibboutz de Be’eri dans un état correspondant de près ou de loin à la description de Melamed.

Ce qui se rapproche le mieux du récit du secouriste, ce sont deux adolescentes résidant à Be’eri, Yahel et Noiya Sharabi, qui ont été tuées le 7 octobre. Mais, selon le Times of Israel, les corps des jeunes filles ont été « retrouvés enlacés » avec leur mère, et non « seuls, séparés du reste de la famille ».

Les médias israéliens ont également rapporté que « Lianne et Yahel [Sharabi] n’ont pu être identifiées que grâce à des échantillons d’ADN. Noiya l’a été grâce à ses dents, il y a seulement deux jours ».

Alors, comment Melamed a-t-il pu trouver du sperme sur l’une des filles et des ecchymoses sur l’autre, et voir leur état vestimentaire, si leurs corps avaient été brûlés au point d’être méconnaissables ? La seule réponse est qu’il a inventé tout ce scénario.

Avant que Melamed ne concocte des atrocités pour le New York Times, lesquelles ont ensuite été resservies par l’ARCCI, il est apparu sur une chaîne d’information indienne de droite pour inventer un récit sur la découverte d’un bébé mort jeté dans une poubelle par le Hamas. Étant donné qu’un seul enfant en bas âge a été tué le 7 octobre — un bébé d’un an abattu accidentellement par un militant du Hamas —, l’histoire du secouriste ne peut pas être vraie.

Melamed n’était qu’un personnage parmi une collection hétéroclite de sauveteurs israéliens autoproclamés qui ont inventé des histoires d’atrocités sur le 7 octobre pour gagner en notoriété dans la presse occidentale. Les affabulateurs les plus prolifiques étaient issus d’un groupe ultra-orthodoxe israélien affilié à l’État, appelé ZAKA. C’est ce groupe qui a « confirmé » le récit bidon du Hamas décapitant des bébés le 7 octobre et qui a inventé l’histoire d’un militant palestinien découpant le fœtus du ventre d’une femme juive enceinte.

Comme l’a rapporté The Grayzone, ZAKA est une organisation tristement célèbre pour sa corruption, fondée par un agresseur sexuel prolifique. Avant le 7 octobre, le groupe était presque insolvable, mais, depuis qu’il a attiré l’attention de la communauté internationale par les mensonges éhontés de ses bénévoles, il a engrangé des millions de la part de riches donateurs de la diaspora juive, parmi lesquels le milliardaire russe Roman Abramovitch et Mark Zuckerberg de Meta.

Yossi Landau, le « commandant » de ZAKA qui a inventé toute une série d’histoires d’horreur sur le 7 octobre, a déclaré que ceux qui mettent en doute sa crédibilité « devraient être tués ».

Max Blumenthal : « Des bébés décapités aux fœtus arrachés à leur mère le 7 octobre, Yossi Landau, de l’organisation de “sauvetage” corrompue ZAKA, a inventé des atrocités odieuses.
Biden et Blinken se sont fait l’écho de ses mensonges.
Aujourd’hui, il déclare que ceux qui remettent en question ses fables “devraient être tués”.
thegrayzone.com/2023/12/06/sca… »

Le journal israélien Haaretz a ensuite révélé de nombreux cas où des volontaires de ZAKA, ne disposant d’aucune accréditation de coroner, ont malmené des cadavres, mélangé des parties de corps et passé des appels de fonds en ayant des cadavres à proximité. Dans un cas, les volontaires ont placé un cadavre près d’eux pour « faire partie d’une mise en scène — une exposition destinée à attirer les donateurs, juste au moment où la course contre la montre pour rassembler et enlever les corps des victimes du massacre [du 7 octobre] était la plus urgente ».

Le document de l’ARCCI cite les volontaires de ZAKA pas moins de 14 fois.

Parmi ces témoignages, un volontaire affirme à la BBC avoir trouvé une femme avec un couteau planté dans les parties génitales. Il n’existe cependant aucune preuve médico-légale ou photographique à l’appui de ce souvenir macabre. En fait, il n’existe aucune preuve médico-légale à l’appui de la moindre allégation israélienne d’abus sexuel commis par des militants palestiniens le 7 octobre.

L’ARCCI s’appuie également sur les souvenirs hallucinatoires de « Sapir », la supposée « témoin vedette » de la police israélienne, qui a raconté au New York Times des scènes si outrageusement obscènes qu’elles défient l’entendement. Cette personne anonyme a affirmé qu’après avoir reçu une balle dans le dos au festival de musique électronique Nova, elle avait vu des militants du Hamas violer collectivement et poignarder une femme, puis lui trancher le sein avec un cutter avant de le faire circuler et de s’amuser avec. « Sapir » poursuit en affirmant que les militants ont découpé le visage de la femme, à la manière d’Hannibal Lecter, puis ont décapité trois autres femmes en sa présence.

Selon Haaretz, « les enquêteurs n’ont pas été en mesure d’identifier les femmes qui, d’après le témoignage de [Sapir] et d’autres témoins oculaires, ont été violées et assassinées ». Le commissaire de police israélien Adi Edry a déclaré au journal : « J’ai des preuves circonstancielles, mais, en fin de compte, mon devoir est de trouver des preuves qui confirment son témoignage et de trouver l’identité des victimes. À ce stade, je ne dispose pas de ces cadavres spécifiques. »

Une autre éminente fabulatrice du 7 octobre, la réserviste militaire israélienne Shari Mendes, est citée six fois dans le document de l’ARCCI. À un moment donné, l’association cite Mendes affirmant que des militants du Hamas ont violé des bébés et des personnes âgées le 7 octobre. « Nous avons vu des organes génitaux tranchés, des têtes tranchées, des bébés — des mains, des pieds, sans raison », a-t-elle déclaré.

À une autre occasion, Mendes a insisté à tort : « Un bébé a été découpé d’une femme enceinte et a été décapité, puis la mère a été décapitée. »

Mr N : « ⚡️ Dénoncer Shari Mendes : l’Israélienne sans aucune crédibilité qui promeut le canular du viol ⚡️
Fil 🧵
(Je n’ai que 100 abonnés, j’ai besoin de votre aide pour la dénoncer.) »

L’ARCCI achève son rapport avec le témoignage recyclé de Raz Cohen, le survivant de l’attaque du 7 octobre qui a déclaré au New York Times avoir été témoin d’un viol collectif commis par des Palestiniens sur des femmes israéliennes, au festival de musique électronique Nova. Comme l’a révélé The Grayzone, Cohen n’a jamais mentionné avoir été témoin de telles scènes lors de ses premières interviews sur les attaques ; il a changé son histoire à plusieurs reprises par la suite, ajoutant des détails sensationnels au fur et à mesure que le temps passait. Après avoir participé à un étrange défilé de mode à Tel-Aviv sur le thème du 7 octobre, Cohen a refusé une interview complémentaire avec le Times pour répondre aux questions concernant sa crédibilité.

Le document de l’ARCCI a été financé par les gros bonnets du lobby israélien à l’origine du « 10/7 Project », une opération de relations publiques

Bien que publié par une association apparemment dédiée au soutien des victimes d’agressions sexuelles en Israël, le document de l’ARCCI alléguant des viols « systématiques » par le Hamas a été financé par des groupes de pression sionistes aux États-Unis. Parmi ses principaux sponsors, figurent la Charles and Lynn Schusterman Family Foundation — qui a donné des millions à des initiatives liées à l’AIPAC — et la Jewish Federations of Greater Miami.

L’AIPAC et les Fédérations juives sont également des piliers essentiels de la coalition des lobbies d’Israël à l’origine d’une nouvelle initiative de propagande appelée « 10/7 Project » (« Projet 7/10 »). Selon Axios, le projet 7/10 comprend « une opération de communication centralisée qui vise à fournir aux rédactions et aux décideurs politiques des informations basées sur des faits concernant la guerre [de Gaza] ».

Dans sa tentative de justifier l’assaut sanglant d’Israël sur la bande de Gaza — qui a fait près de 30 000 morts en plus de 130 jours, la plupart étant des femmes et des enfants —, le projet 7/10 a engagé des sociétés de relations publiques très puissantes du Parti démocrate comme SKDK pour, selon ses termes, « raconter à nouveau l’histoire de la boucherie de l’attaque du 7 octobre et faire des négationnistes du 7/10 des parias ».

Que le projet 7/10 soit ou non responsable du blitz publicitaire entourant le nouveau document de l’ARCCI sur les viols « systématiques » du Hamas, il est clair que les médias occidentaux sont devenus les blanchisseurs de la propagande israélienne sur le 7 octobre, recyclant des allégations discréditées à travers une série apparemment sans fin de dossiers douteux, et présentant chacun d’eux comme une preuve fraîchement obtenue de la sauvagerie palestinienne.

Opération « Déluge d’Al-Aqsa » (7 octobre 2023)


  1. Les Forces de défense d’Israël (צְבָא הַהֲגָנָה לְיִשְׂרָאֵל / Tsva ha-Haganah le-Israël — Israel Defense Forces / IDF) sont couramment désignées par l’acronyme Tsahal (צה"ל). Il s’agit de l’armée de l’État d’Israël. (NdT) 

 

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