La répression à Columbia menée par une professeure d’université doublée d’une espionne du département de la Police de New York

La répression à Columbia
menée par
une professeure d’université
doublée d’une espionne
du département de la Police
de New York

Par Wyatt Reed et Max Blumenthal

Une publication The Grayzone


Démocratie Répression Droits de l’homme
États-Unis Israël Palestine Occident
Article

Traduit de l’anglais par EDB () • Langue originale : anglais


Rebecca Weiner est une professeure de l’université de Columbia qui occupe également le poste de directrice du renseignement au sein du département de la Police de New York. Le maire Eric Adams lui attribue :

  • l’espionnage des étudiants qui manifestent contre le génocide
  • et la direction de l’opération militarisée qui les a délogés du campus.

*

Eric Adams, le maire de la ville de New York, a déclaré que la violente répression menée contre les étudiants de Columbia, qui protestaient contre l’agression génocidaire d’Israël sur la bande de Gaza, a été dirigée par un membre de l’université elle-même.

Rebecca Weiner est professeure adjointe (Adjunct Professor) à Columbia. Elle a également un second emploi : elle dirige le Bureau du contre-terrorisme du département de la Police de New York (New York Police Department / NYPD). Lors d’une conférence de presse tenue le 1er mai, quelques heures seulement après l’arrestation de près de 300 personnes dans l’enceinte de l’université, Adams a fait l’éloge de Rebecca Weiner pour avoir donné le feu vert à la police afin d’expulser par la force les étudiants qui protestaient contre le génocide.

« C’est elle qui surveillait la situation », a expliqué Adams, ajoutant que la répression a eu lieu après « qu’elle ait pu… que son équipe ait pu mener une enquête ».

Columbia | SIPA : « Félicitations à Rebecca Weiner, professeure adjointe à la SIPA, qui a récemment été nommée commissaire adjointe au renseignement et au contre-terrorisme du NYPD par le @NYPDPC, Edward Caban. »
nyc.gov/office-of-the-…

Le 30 avril, à la demande de l’administration, des dizaines de policiers en tenue antiémeute sont descendus dans le Hamilton Hall de Columbia, après que des étudiants se sont emparés du bâtiment plus tôt dans la journée. Quelques heures plus tard, des agents ont utilisé un véhicule BearCat du NYPD lourdement blindé pour pénétrer dans le bâtiment par la fenêtre du deuxième étage et arrêter les personnes qui s’y trouvaient, tandis qu’une autre équipe balayait les membres du campement à l’extérieur.

Le 17 avril, les étudiants de Columbia ont intensifié leur protestation contre l’assaut génocidaire d’Israël sur la bande de Gaza assiégée. Ils ont campé dans l’enceinte de l’école, affirmant leur refus de partir tant que l’université ne se serait pas totalement désengagée de ses investissements liés à Israël. Ce modèle de manifestation s’est depuis étendu à plus de 100 autres universités aux États-Unis, et a même été repris à l’étranger, avec des actions similaires à l’université de Leeds au Royaume-Uni et à la Sorbonne à Paris.

À quelques centaines de mètres du campement des manifestants pour Gaza, Weiner a ouvert un bureau à la School of International and Public Affairs (SIPA) de Columbia. Sa biographie SIPA la décrit comme une « professeure associée adjointe (Adjunct Associate Professor) en relations internationales et publiques » qui occupe en même temps le poste de « cadre civil responsable du Bureau du renseignement et du contre-terrorisme du département de la Police de la ville de New York ».

À ce titre, selon la SIPA, Weiner « élabore des politiques et des priorités stratégiques pour le Bureau du renseignement et du contre-terrorisme et représente publiquement le NYPD dans les questions relatives au contre-terrorisme et au renseignement ».

Le Bureau du contre-terrorisme du NYPD dispose actuellement d’un siège à Tel-Aviv, en Israël, où il assure la coordination avec l’appareil de sécurité israélien et maintient une liaison avec le département. Weiner semble servir de pont entre les sièges du Bureau en Israël et à New York.

Bahar Ostadan : « La liaison du NYPD en Israël a envoyé des mises à jour “toutes les heures” au quartier général du NYPD dans le sud de Manhattan depuis les attaques du Hamas en Israël le 7 octobre, selon la commissaire adjointe du NYPD chargée du renseignement et du contre-terrorisme, Rebecca Weiner. »

En 2011, une enquête de l’Associated Press a révélé qu’une « unité démographique » opérait secrètement au sein du Bureau du renseignement et du contre-terrorisme du NYPD. Cette unité espionnait les musulmans de la région de New York, et même les étudiants dans les campus en dehors de l’État qui participaient à des activités de solidarité avec la Palestine. L’unité a été développée en tandem avec la CIA, laquelle a refusé de nommer l’ancien chef de la section du Moyen-Orient qu’elle a affecté dans les rangs supérieurs de la division du renseignement du NYPD.

L’« unité démographique » semble également avoir été inspirée par les services de renseignement israéliens. Comme l’a déclaré un ancien responsable de la police à l’Associated Press, l’unité a tenté de « cartographier le terrain humain de la ville » par le biais d’un programme « calqué en partie sur la manière dont les autorités israéliennes opèrent en Cisjordanie ».

Avocate de formation, Weiner a supervisé les négociations entre le NYPD et les avocats des musulmans locaux dont les libertés civiles avaient été violées par son « unité démographique ».

Weiner est la petite-fille de Stanislaw Ulam, mathématicien juif polonais qui a contribué à la conception de la bombe à hydrogène dans le cadre du projet Manhattan. « Je suis très fière de cet héritage », a-t-elle déclaré lorsqu’elle a été nommée chef du renseignement du NYPD.

Weiner du NYPD et de Columbia : le raid militarisé était une réponse à la « rhétorique associée au terrorisme » des étudiants — et les posts TikTok

Lors de la conférence de presse triomphale de la police de New York, le 1er mai après le raid, Weiner a accusé des « agitateurs extérieurs » d’avoir déclenché la répression policière de type militaire à Columbia. Cependant, elle a refusé de nommer les personnes extérieures supposées se trouver sur les lieux.

Selon Weiner, la réaction de la police n’a pas été rendue nécessaire par un comportement criminel, mais par le langage et les symboles radicaux des étudiants. « Il ne s’agit pas d’étudiants qui expriment des idées. » Le vrai problème, selon elle, est le prétendu « changement de tactique » des manifestants qui représente « une normalisation et une généralisation de la rhétorique associée au terrorisme ».

Michael Tracey : « Rebecca Weiner, chef du Bureau du “contre-terrorisme” du NYPD, identifie l’une des menaces qui auraient nécessité le raid sur Columbia : “la généralisation de la rhétorique associée au terrorisme”. Il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’une reformulation du discours politique en termes de “terrorisme”. Elle blâme également TikTok. »

La preuve de cette dynamique, toujours selon Weiner, peut être observée dans ce qu’elle affirme être la tendance « courante » du port de « bandeaux pour la tête associés à des organisations terroristes étrangères » sur les campus universitaires ; la « réédition de la lettre de 2002 d’Oussama ben Laden à l’Amérique » sur TikTok ; et une brève visite à Columbia de Nahla Al-Arian, qu’elle a décrite à tort comme « l’épouse d’une personne qui a été condamnée pour soutien matériel au terrorisme ».

« Ce n’est pas quelqu’un que je voudrais voir influencer mon enfant si j’étais parent d’un élève de Columbia », a encore commenté Weiner.

Le mari de Nahla, l’universitaire palestinien Sami Al-Arian, avait été inculpé de terrorisme en 2003, mais le jury avait refusé de le condamner. Néanmoins, le bref passage de Nahla au campement de Columbia — où elle dit ne pas avoir interagi avec les manifestants — a été cité par Adams lors de trois interventions médiatiques distinctes pour justifier la répression policière.

Aaron Maté : « @thelauracoates de CNN vient de qualifier @SamiAlArian, dont la femme s’est apparemment rendue au campement de Columbia il y a quelques jours en signe de solidarité, de “terroriste condamné”. Il s’agit d’un mensonge malveillant.
Il n’a jamais été condamné pour terrorisme. Il a été inculpé dans une affaire bidon dans le cadre du Patriot Act. Les jurés ne l’ont condamné pour aucun chef d’accusation. Lorsque les procureurs ont réintroduit l’affaire plutôt que d’accepter leur défaite, il a choisi de plaider et d’accepter l’expulsion plutôt que de subir un nouveau procès. Les procureurs ont alors prolongé sa peine de prison en essayant de le forcer à témoigner dans une affaire sans rapport avec la sienne.
Au cours de cette épreuve, il a passé des années à l’isolement.
C’est un ancien prisonnier politique et un symbole de la déshumanisation des Palestiniens que les courageux étudiants dénoncent.
CNN devrait se rétracter et présenter des excuses. »

Tout au long de la conférence de presse, le maire Adams a présenté à plusieurs reprises la répression de la parole étudiante comme la seule solution possible aux campements qui se poursuivent sur les campus, en invoquant des menaces indéfinies pour l’esprit des jeunes influençables.

« Il y a un mouvement de radicalisation des jeunes, et je ne vais pas attendre que ce soit fait pour en reconnaître soudainement l’existence », a-t-il proclamé.

« Les jeunes sont influencés par ceux qui sont des professionnels de la radicalisation de nos enfants », a-t-il insisté, sans pour autant donner de précisions. « Et je ne permettrai pas que cela se produise en tant que maire de la ville de New York. »

Après avoir proclamé avec colère que son « oncle est mort pour défendre ce pays », Adams a déclaré : « Il est méprisable que des écoles permettent au drapeau d’un autre pays de flotter dans notre pays. »

Cependant, en tant que participant enthousiaste à la parade annuelle « Celebrate Israel » de la ville de New York, Adams n’est guère embarrassé par le fait qu’il brandisse lui-même le drapeau d’un autre pays.

Eric Adams, maire de New York, brandit le drapeau israélien lors de la parade « Celebrate Israel », le 4 juin 2023.
[Benny Polatseck / Mayoral Photography Office]

 

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